La rupture conventionnelle en 10 questions

Lettres d'information | 12 mars 2021

Le succès de la rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail, instaurée il y a plus de 10 ans, ne se dément pas, avec 444 000 ruptures conclues en 2019.

La rupture conventionnelle homologuée permet à un employeur et à un salarié de rompre, d’un commun accord, un contrat de travail, et de faire valider cette rupture par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte).

Ses avantages ? Les employeurs « sécurisent » la rupture grâce à l’aval de l’administration, et les salariés bénéficient du versement d’une indemnité de rupture tout en ayant droit aux allocations d’assurance chômage.

À qui s’adresse la rupture conventionnelle ?

Seul un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) peut être rompu dans le cadre d’une rupture conventionnelle homologuée. Elle ne permet donc pas de rompre un contrat à durée déterminée (CDD). Par ailleurs, la loi interdit de recourir à la rupture conventionnelle homologuée pour les départs dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

En revanche, une rupture conventionnelle peut être conclue durant la suspension du contrat de travail du salarié en raison, par exemple, d’un arrêt de travail consécutif à un accident de travail ou à une maladie professionnelle, d’un congé de maternité, d’un congé parental d’éducation ou d’un congé sabbatique.

Qui doit la proposer ? 

L’employeur et le salarié peuvent indifféremment proposer de négocier une rupture conventionnelle. Une proposition qui ne doit cependant pas être faite de manière trop abrupte, car elle risquerait alors d’être fort mal vécue. Il faut, en effet, toujours garder à l’esprit que non seulement les pourparlers de rupture conventionnelle peuvent ne pas aboutir, mais qu’ils peuvent également très bien ne jamais commencer !

Faut-il discuter longtemps ?

Contrairement à la procédure de licenciement, aucun calendrier de discussion n’est imposé par la loi. La seule obligation étant d’organiser au moins un entretien au cours duquel employeur et salarié conviennent de mettre un terme à leur collaboration. Mais attention, ils doivent tout de même prendre le temps suffisant pour régler toutes les modalités de la rupture (sort de la clause de non concurrence ou des avantages en nature, notamment).

Plus généralement, ce ou ces entretiens préparatoires ont pour objectif de garantir le consentement éclairé du salarié. Il est donc pertinent de prévoir un compte rendu écrit, signé par l’employeur et le salarié, récapitulant la teneur de chaque entretien.

Lors des discussions, peut-on être assisté ?

Conscients que la présence d’autres personnes est souvent utile au bon déroulement d’une négociation, les pouvoirs publics ont prévu la possibilité pour le salarié et l’employeur d’être assistés.

Si le salarié décide de se faire aider, il doit en informer, oralement ou par écrit, son employeur. Dans cette hypothèse, ce dernier peut, lui aussi, se faire assister, à condition de prévenir à son tour le salarié.

Le salarié peut être assisté par un autre salarié de l’entreprise ou, en l’absence de comité social et économique, par une personne inscrite sur une liste de conseillers dressée par le préfet et disponible en mairie ou auprès de l’inspection du travail.

Côté employeur, il peut s’agir d’un membre du personnel de l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50 salariés, d’une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeurs, ou d’un autre employeur relevant de la même branche d’activité.

Faut-il un accord écrit ?

Le Code du travail impose la signature d’une convention qui a pour objet de définir les conditions de la rupture. Ce document doit préciser, notamment, le montant de l’indemnité versée au salarié et la date de la rupture du contrat de travail

Cette convention doit être établie en deux exemplaires datés et signés par l’employeur et le salarié. L’un d’entre eux est conservé par l’employeur et l’autre remis au salarié.

Et attention, car en cas de litige, c’est à l’employeur de prouver qu’il a bien remis un exemplaire de la convention au salarié ! Dès lors, pour se ménager cette preuve, l’employeur doit remettre son exemplaire au salarié contre décharge ou lui faire apposer de manière manuscrite, dans la convention, une mention indiquant qu’un exemplaire de la convention lui a bien été remis tel jour.

Peut-on changer d’avis après la signature ?

À compter de la signature de la convention de rupture, l’employeur et le salarié disposent de 15 jours calendaires (en comptant tous les jours de la semaine) pour revenir sur leur décision. Pour être valable, cette rétractation doit être communiquée à l’autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en mains propres contre décharge. La rétractation n’ayant pas à être motivée.

Comment se déroule l’homologation ?

L’homologation permet aux pouvoirs publics de s’assurer que la procédure de rupture conventionnelle a bien été respectée (règle d’assistance, délai de rétractation…) et de vérifier que le consentement de l’employeur et du salarié à cette rupture est libre. À l’issue du délai de rétractation (et surtout pas avant !), l’employeur ou le salarié doit demander l’homologation de la rupture conventionnelle auprès de la Direccte. L’administration dispose alors de 15 jours ouvrables (en ne comptant ni les dimanches ni les jours fériés), à partir de la réception de la demande, pour répondre. Sachant qu’en l’absence de réponse dans ce délai de 15 jours, l’homologation est acquise.

Quand la rupture prend-elle effet ?

Le contrat de travail prend fin à la date mentionnée dans la convention de rupture et, au plus tôt, le lendemain de la réception de la décision d’homologation de la Direccte (ou de l’expiration du délai de 15 jours). 

Et c’est aussi après validation de la rupture conventionnelle par l’administration que l’employeur devra remettre au salarié un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle emploi.

La rupture peut-elle être contestée ?

La validité de la rupture ainsi que son homologation peuvent être contestées devant le conseil de prud’hommes dans les 12 mois suivant la date d’homologation de la convention par la Direccte. Sachant que seuls le vice du consentement (dol, contrainte…) et la fraude peuvent remettre en cause cette validité. Toute clause insérée dans la convention visant à renoncer à la possibilité de contester la rupture est réputée non écrite.

Passé ce délai d’un an, le divorce est définitivement consommé entre l’employeur et le salarié !

Comment se déroule la rupture conventionnelle avec un salarié protégé ?

Pour mener à bien une rupture conventionnelle, l’employeur et le salarié protégé (délégué syndical, membre du comité social et économique…) doivent conclure une convention qui sera adressé, pour autorisation, à l’inspecteur du travail. Ce document doit impérativement mentionner la nature du ou des mandats détenus par le salarié.

Et attention, car le projet de rupture conventionnelle conclu avec un membre du comité social et économique doit obligatoirement être soumis à la consultation de ce comité. L’avis de ce dernier devant être transmis à l’inspection du travail en complément de la convention.

L’inspecteur du travail apprécie alors la liberté du consentement du salarié protégé en diligentant une enquête contradictoire (audition individuelle de l’employeur et du salarié).

La rupture conventionnelle devient effective le lendemain du jour de l’autorisation de l’inspecteur du travail, ce dernier devant statuer dans les 15 jours ouvrables suivant la réception de la demande. Toutefois, il peut ne pas répondre. Dans ce cas, son silence vaut décision implicite de rejet au bout de 2 mois.

La décision de l’inspecteur du travail peut être contestée devant le tribunal administratif.